Il semble que la Chambre des représentants des États-Unis doive retourner à la planche à dessin. Éviter la paralysie du gouvernement s’annonce ardu et nous mettons en lumière les répercussions de la situation sur les marchés financiers.
12 octobre 2023
Par Atul Bhatia, CFA
Compte tenu de la destitution de Kevin McCarthy à titre de président de la Chambre des représentants des États-Unis, il est très probable, selon nous, que le gouvernement subisse une paralysie partielle à la mi-novembre. À notre avis, cette paralysie pourrait durer beaucoup plus longtemps qu’une période symbolique de 24 à 48 heures, ce qui est tout à fait différent de notre opinion à l’égard du risque de paralysie à la fin de septembre.
Le président de la Chambre joue un rôle très partisan, et les candidats à ce poste comptent généralement sur les votes de leur propre parti pour être élus. Si cette tendance persiste – et nous croyons que ce sera le cas – le processus électoral pourrait s’avérer complexe, car un candidat ne peut se permettre de perdre qu’une poignée de votes républicains afin d’obtenir la majorité nécessaire pour être élu. Le candidat républicain actuel à la présidence de la Chambre des représentants, Steve Scalise, n’a pas réussi jusqu’ici à obtenir un soutien suffisant pour obtenir le poste.
En plus de la complexité entourant cette élection, il est difficile pour un candidat de rester en poste en raison de la faible majorité. Les règles actuelles permettent à n’importe quel député de présenter une motion de destitution, soit la manœuvre procédurale qui a été utilisée pour déloger M. McCarthy. Par conséquent, l’élection d’un président à la Chambre des représentants dépend de groupe d’environ 10 républicains, y compris le groupuscule qui vient de destituer le dernier en poste.
Tout candidat le sait et devrait donc être à l’aise de prôner une politique partisane agressive. Par conséquent, nous croyons que toute proposition de budget présentée par le nouveau président de la Chambre sera rejetée dès qu’elle sera présentée au Sénat et ne sera jamais signée par le président américain Joe Biden. Selon nous, la probabilité qu’une entente soit conclue avant la paralysie semble très faible.
Lorsque M. McCarthy était président de la Chambre des représentants, nous étions d’avis que toute paralysie serait symbolique avant qu’une entente pragmatique ne soit conclue. Selon nous, le risque de fermeture prolongée sera d’autant plus grand lorsque son successeur prendra les rênes de la présidence de la Chambre, et ce, pour trois raisons :
En bref, nous estimons que le prochain président de la Chambre penchera sans doute en faveur d’une paralysie et pourrait être en mesure de profiter d’un avantage tant sur le plan des politiques que de la politique s’il s’en tient à une telle stratégie. À moins que les résultats des sondages qui attribuent la responsabilité de la paralysie à l’un des partis changent radicalement, il est difficile d’entrevoir les raisons pour lesquelles une fermeture prendrait fin rapidement.
Bien qu’il soit théoriquement possible que la Chambre des représentants élise un président plus pragmatique et axé sur les ententes, il nous semble difficile d’entrevoir comment ce résultat est politiquement viable.
Une personne pragmatique n’a guère de chances d’être élue uniquement grâce aux votes des républicains, d’après nous. Comme l’ont montré les événements récents, la conclusion d’ententes et les compromis sont incompatibles avec ce que la motion de destitution symbolise à l’heure actuelle, et toute modification de cette procédure coûterait probablement plus de votes à un candidat que la faible marge républicaine.
Dans les faits, un président de la Chambre des représentants qui souhaite négocier des ententes aurait probablement besoin d’un certain soutien de la part des démocrates pour être élu.
Nous considérons que cette éventualité est peu probable pour deux raisons.
Premièrement, les démocrates ne recevraient probablement rien en échange de leur appui. Un candidat ne serait nullement obligé de donner suite à ses engagements; une fois élu, il pourrait faire volte-face, et les démocrates n’auraient plus aucun recours à cet égard.
Deuxièmement, tout engagement serait probablement contre-productif. Un candidat à la présidence qui compte sur l’appui des démocrates pour être élu serait, selon nous, entaché aux yeux de l’électeur républicain moyen. Par conséquent, un membre républicain de la Chambre des représentants qui voterait en faveur d’un tel candidat risquerait de perdre son siège, fort probablement au profit d’un adversaire de son parti.
Une solution à cet égard serait qu’un membre républicain de la Chambre en poste depuis longtemps soit prêt à agir à titre de gardien, sachant qu’il perdrait probablement son siège à la prochaine primaire. En théorie, cela pourrait fonctionner, grâce à un soutien pragmatique bipartite. En pratique, il s’agit probablement d’une utopie.
Le résultat de cette élection pourrait être inattendu. La Chambre peut élire n’importe qui à la présidence; il ne doit pas nécessairement s’agir d’un membre en place. Nous n’écartons pas entièrement cette possibilité, mais nous croyons qu’elle est relativement peu probable pour l’instant.
Par le passé, les paralysies n’ont pas eu d’incidence immédiate importante sur les marchés, comme l’indique le tableau de la page suivante, mais il est difficile de tirer des conclusions solides étant donné la rareté des données sur les fermetures qui durent plus de 48 heures.
* La variation du taux de chômage représente la variation d’un mois sur l’autre entre le début et la fin du mois. Pour les paralysies qui ont duré quelques jours, la variation est nulle, puisque ces paralysies ne se sont pas prolongées au-delà du mois de début.
Sources : RBC Marchés des capitaux, Bloomberg, Haver Analytics et Chambre des représentants des États-Unis
Cette fois-ci, nous croyons que même une brève paralysie pourrait entraîner Moody’s à abaisser la note de crédit des États-Unis sous AAA. Selon nous, l’incidence directe d’une nouvelle révision à la baisse de la note de crédit sera limitée, et ce, même si la paralysie et l’évolution de la note pourraient accroître les préoccupations à l’égard de la gouvernance, ce qui pourrait exercer des pressions sur les obligations du Trésor américain à long terme.
Sur le plan économique, une paralysie qui amoindrirait le déficit budgétaire devrait avoir un effet désinflationniste. Dans ce cas, la Réserve fédérale américaine pourrait se voir obligée de passer plus rapidement à une politique moins restrictive. Nous pensons que les investisseurs en obligations réagiraient favorablement à un tel changement ainsi qu’à une éventuelle amélioration de la dynamique de la dette aux États-Unis. Selon nous, une réduction du budget fédéral nuirait à la croissance à court terme et augmenterait la probabilité d’une récession aux États-Unis.
Une fermeture prolongée du gouvernement cause des dommages, en particulier aux familles qui dépendent des salaires et des paiements du gouvernement ainsi qu’à la myriade d’entreprises et d’entrepreneurs connexes qui dépendent directement ou indirectement du gouvernement des États-Unis pour les revenus. Les versements qui font défaut sont généralement versés à la suite d’une paralysie, de sorte qu’une partie, mais non la totalité, du terrain perdu sur le plan de la consommation est récupéré. Plus la fermeture du gouvernement dure longtemps, toutefois, plus le pourcentage de reprise probable est faible.
Dans ce cas, nous croyons que la volatilité devrait s’accentuer en prévision d’une éventuelle paralysie en novembre, et nous entrevoyons un risque élevé de ventes massives sur le marché boursier. Par conséquent, nous privilégions les titres à revenu fixe de grande qualité, en particulier ceux qui se situent dans le milieu de la courbe des taux. Les obligations à long terme pourraient profiter d’une amélioration potentielle de la dynamique budgétaire aux États-Unis, mais il y a lieu de croire que l’effet de ces progrès soit annulé par des préoccupations liées à la gouvernance.
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