Après avoir attendu son heure, la Fed a amorcé son cycle d’assouplissement monétaire en débutant en force ses réductions de taux. Même si les investisseurs pourraient craindre que la Fed s’emballe, nous soulignons pourquoi nous sommes encouragés par la décision proactive de la Fed.
19 septembre 2024
Thomas Garretson, CFA Premier stratégiste, PortefeuillesStratégies des titres à revenu fixeServices-conseils en gestion de portefeuille – États-Unis
Comme s’y attendaient largement les marchés, la Réserve fédérale américaine (Fed) s’est finalement jointe au cycle mondial d’assouplissement monétaire en réduisant son taux directeur de 50 points de base cette semaine, le faisant passer d’une fourchette de 5,25 %-5,50 % à 4,75 %-5,00 %. Bien qu’il y ait eu un degré d’incertitude inhabituel à l’approche de la rencontre sur la politique monétaire de cette semaine, en ce qui a trait à l’ampleur de la réduction – 25 ou 50 pb –, nous nous attendions à une réduction de 50 pb et, par conséquent, nous croyons que la Fed a pris la bonne décision.
D’après le compte rendu de la réunion de juillet, les décideurs ont déjà discuté ouvertement de la possibilité de réduire les taux. Depuis, les pressions inflationnistes se sont encore atténuées, tandis que les deux rapports sur les emplois publiés ont fait état de données grandement inférieures aux attentes consensuelles de Bloomberg. Même si le président de la Fed, Jerome Powell, n’est pas allé jusqu’à dire que la forte réduction de taux cette semaine constitue une tentative de rattraper un marché de l’emploi qui pourrait ralentir plus rapidement que prévu par les décideurs, nous le dirions.
Toutefois, à notre avis, il reste à voir s’il s’agit d’un cas classique de « trop peu, trop tard ». En 2001 et en 2007, la Fed a amorcé des cycles d’assouplissement en réduisant les taux de façon démesurée, mais il s’agit bien sûr de périodes de référence pour lesquelles la comparaison est difficile. Nous croyons que la décision proactive de la Fed cette semaine, à un moment où les décideurs auraient pu facilement justifier une réduction standard de 25 pb, devrait soutenir les perspectives d’un soi-disant atterrissage en douceur de l’économie, tout en réduisant les risques d’un atterrissage brutal. Mais cette situation demeure évidemment très incertaine et est fortement tributaire de l’évolution des données économiques.
Étant donné que cette semaine, la Fed a décidé de procéder à une réduction de plus grande ampleur que ce qui était attendu par le marché et que ses propres estimations révisées de taux indiquent également plus de réductions de taux qu’anticipé, les investisseurs pourraient craindre que la Fed s’emballe et que des réductions de taux plus vigoureuses puissent raviver les pressions inflationnistes.
Bien que le taux directeur de la Fed retienne une grande partie de l’attention, tout est relatif. Ce qui compte vraiment sur le plan de l’activité économique, de l’inflation et de l’emploi est le niveau des taux d’intérêt réels – ou le taux directeur de la Fed rajusté en fonction de l’inflation.
Les taux réels ont atteint un sommet d’environ 3 % au cours des derniers mois – le taux des fonds fédéraux étant de 5,5 % et le taux d’inflation globale des dépenses personnelles de consommation (DPC) de 2,5 % selon les données les plus récentes en juillet – un niveau conforme à ceux des dernières décennies. Toutefois, ces points ont également tendance à être suivis de récessions.
Le graphique linéaire montre le taux directeur réel de la Réserve fédérale, ou taux directeur officiel rajusté en fonction de l’inflation, depuis 1988, et le taux prévu jusqu’à la fin de 2026. Le taux réel a fortement augmenté par rapport à son creux de -6,4 % en avril 2022 et a atteint un sommet d’environ 3 % en juillet. Les prévisions de la Fed en matière de taux et d’inflation donnent à penser qu’il ne devrait baisser que graduellement, pour atteindre un niveau d’environ 1 % à la fin de 2026.
Sources : RBC Gestion de patrimoine, Bloomberg
Le sommaire des projections économiques mis à jour de la Fed montre que celle-ci prévoit abaisser la limite supérieure de sa fourchette cible à 4,50 % d’ici la fin de l’année, à 3,50 % en 2025 et à 3,00 % en 2026. Les décideurs s’attendent également à ce que l’inflation revienne à sa cible au cours de cette période, ce qui laisserait les taux réels à un niveau relativement élevé de 1,00 % (taux des fonds fédéraux de 3,00 % moins le taux d’inflation cible de 2,00 %).
Parallèlement, si nous pensons que les mesures de la Fed pourraient améliorer les perspectives économiques, nous devons reconnaître qu’une légère amélioration de celles-ci pourrait également signifier que les progrès sur le plan de l’inflation pourraient ralentir.
En 2023, et dans un contexte d’incertitude toujours élevée quant à savoir si l’inflation allait ralentir au point de permettre à la Fed de réduire les taux en 2024, nous nous sommes tournés vers les marchés émergents pour obtenir des indices. De l’avis général, l’inflation tend à être plus problématique pour les marchés émergents et, par conséquent, les banques centrales de ces pays doivent être plus sensibles aux risques inflationnistes.
Par exemple, la Banque centrale du Brésil a commencé à relever les taux au début de 2021, environ un an avant que les banques centrales des marchés développés lui emboîtent le pas. À l’été 2023, la Banque centrale du Brésil a commencé à réduire les taux à mesure que les pressions inflationnistes s’estompaient. En supposant que ce délai d’exécution se maintienne, il semblait raisonnable que les banques centrales des marchés développés assouplissent leurs politiques d’ici l’été 2024, ce qu’elles ont fait.
Le graphique linéaire compare l’évolution des taux directeurs des banques centrales aux États-Unis, au Canada, au Royaume-Uni et au Brésil de septembre 2020 au 19 septembre 2024. La Banque centrale du Brésil a été à la fois la première à relever les taux et la première à les réduire. Alors que d’autres banques centrales procèdent maintenant à des réductions, la Banque centrale du Brésil a relevé les taux en septembre 2024.
Sources : RBC Gestion de patrimoine, Bloomberg; prévisions de taux réels fondées sur le résumé des projections économiques de la Réserve fédérale pour l’inflation des DPC et le taux des fonds fédéraux
Dans cette optique, tout comme la Fed a abaissé son taux directeur de 50 points de base mercredi, la Banque centrale du Brésil a relevé son taux directeur de 25 pb, sa première hausse depuis qu’elle a commencé à abaisser son taux en août 2023. Les décideurs brésiliens ont indiqué que les risques croissants entourant les prévisions d’inflation plus élevées constituaient une raison de resserrer davantage la politique monétaire et ont souligné que d’autres hausses de taux pourraient être envisagées.
Soyons clairs : nous ne nous attendons pas à une deuxième vague d’inflation aux États-Unis ou à l’échelle mondiale, mais nous devons toujours être conscients des facteurs de risques. Et si nous avons utilisé les banques centrales des marchés émergents comme indicateurs avancés pour les réductions de taux, nous manquerions à notre devoir si nous ne tenons pas l’évolution des autres cycles d’assouplissement à l’œil.
Cela dit, l’une des raisons pour lesquelles les risques de hausse de l’inflation sont revenus au Brésil est la dépréciation de la monnaie, la Banque centrale du Brésil ayant abaissé les taux à un moment où la Fed a repoussé ses baisses. Par conséquent, nous estimons que les réductions de taux de la Fed devraient contribuer à atténuer les pressions sur la devise du Brésil et, par conséquent, les pressions inflationnistes aussi; il ne s’agit donc peut-être pas d’un signe explicite de la recrudescence des risques inflationnistes pour les marchés développés.
La décision proactive de la Fed cette semaine devrait contribuer à améliorer les perspectives économiques, et nous sommes encouragés par le fait que la banque centrale a choisi de le faire alors qu’elle a historiquement été trop réactive, et donc souvent en retard pour réduire le caractère restrictif de sa politique monétaire.
Il ne fait aucun doute qu’une grande incertitude entourant l’économie et la politique monétaire persistera. Nous jugeons toutefois que le début en force des réductions de taux par la Fed devrait contribuer à atténuer les risques de récession à moyen terme ou, à tout le moins, d’une détérioration supplémentaire importante du marché de l’emploi aux États-Unis.
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